Commissariat: Simone Frangi et Katia Schneller en collaboration avec Melis Tezkan
La troisième édition du Festival des Gestes de la Recherche – imaginée par Simone Frangi et Katia Schneller en dialogue avec Melis Tezkan dans le cadre de l’Unité de Recherche “Hospitalité artistique et activisme visuel pour une Europe diasporique et post-occidentale” de l’Ecole Supérieure d’Art et Design – Grenoble (ESAD) – se tiendra cette année en deux moments: un prologue en ligne le 8 novembre 2022 avec Norman Ajari et Seloua Luste Boulbina et une programmation live du lundi 21 au jeudi 24 novembre 2022 au Magasin – Centre National d’Art Contemporain et à l’Ecole supérieure d’art et design de Grenoble.
Les pratiques performatives, audiovisuelles, sonores et théoriques que cette IIIème édition du Festival rassemble questionnent la notion de citoyenneté au-delà de la relation au pouvoir souverain de l’Etat-nation. Le défi actuel pour ces pratiques culturelles est de repenser la rhétorique la plus intensifiée des identités nationales et continentales au profit de formes originales de citoyenneté globale qui – comme Seyla Benhabib l’a souvent souligné dans sa production théorique – nécessitent de se manifester comme flexibles, supranationales et non universalistes.
Au cours du Festival, artistes et théoricien.nes prendront en compte la complexification de nos désirs d’appartenance simultanée à des territoires multiples et la crise de la rhétorique essentialisante des “racines”. Leurs pratiques explorent la citoyenneté comme une re-fabulation d’identifications collectives transnationales et diasporiques. Elles pointent ainsi les processus coloniaux et néo-coloniaux qui ont progressivement stabilisé et légitimé le récit hégémonique de l’eurocentrisme.
Dans le cadre de cette programmation, la citoyenneté deviendra également synonyme de co-habitation et d’interdépendance des vivant.es. Cette approche permettra d’interroger le lien socio-biologique que la pensée binaire propre à l’anthropocentrisme vient constamment briser et mystifier. Le potentiel critique des pratiques artistiques et théoriques présentées dans le cadre du Festival promeut à cet effet des formes d’auto-détermination que peuvent activer les subjectivités, humaines et non humaines, expropriées de leur représentativité au niveau juridique, symbolique et visuel.
Comme le rappelle la théoricienne Jennifer E. Telesca, les pratiques de la citoyenneté dite visuelle ne sont pas des concessions paternalistes attribuées d’en haut. Elles sont, au contraire, le fruit d’un travail d’auto-détermination insistant et collectif. La fabrication de formes de citoyenneté visuelle appelle la mise en place d’“actes visuels” qui produisent une autonomisation représentationnelle. La citoyenneté visuelle ouvre ainsi un espace de ralliement au sein d’un système qui crée non seulement symboliquement, mais aussi matériellement, une distribution différenciée des ressources d’apparition en tant que subjectivités.
Comme l’énonce Jennifer E. Telesca (“Preface: What is Visual Citizenship?”, 2014, en ligne sur le site www.humanityjournal.org): « En tant que concept organisationnel, la citoyenneté visuelle pose la question de savoir ce qui est en jeu dans les représentations. Il propose une façon de marquer, de tracer, de capturer et d’incarner les présupposés, les logiques et les idiosyncrasies curieuses émergeant du fait que les personnes sont situées différemment si elles sont participant·es ou observateur·rices dans les luttes politiques et qu’elles sont, à partir de ce positionnement, vues et entendues, ou pas ».
Le Festival des Gestes de la Recherche, dont les deux premières éditions ont eu lieu en novembre 2020 et 2021, propose un moment de production de savoirs et de mise en partage public de la recherche développée dans le cadre de l’Unité de Recherche “Hospitalité artistique et activisme visuel: pour une Europe diasporique et post-occidentale” (www.pratiquesdhospitalite.com). Ce Festival est un format atypique conçu dans le cadre d’une école d’art comme un espace de recherche en acte mettant en dialogue des artistes, des théoricien·nes et des curateur·rices, visant à créer un tissage de gestes de recherche articulant des formes de parole et des expériences dé-hiérarchisant les relations entre théorie et pratique artistique. L’organisation du Festival est aussi un chantier de travail crucial pour les étudiant.es impliqué.es dans le nouveau Master “Holobionte. Pratiques visuelles, expositions et nouvelles écologies de l’art” de l’Option Art de l’ESAD Grenoble (www.holobionte-grenoble.com).
Le programme de novembre 2022 accueille les artistes Cindy Bannani, Elsa Brès, Binta Diaw, Denise Ferreira Da Silva + Arjuna Neuman, Niko G x Kali, Habibitch, Huniti Goldox, Euridice Zaituna Kala, Belinda Kazeem-Kaminski, Elsa M’Bala, Tabita Rezaire & Amakaba, Amar Ruiz, Selma Selman, les co-auteurs et le co-autrices du collectif Bureau des dépositions, l’autrice Louisa Yousfi et les philosophes Seloua Luste Boulbina et Norman Ajari.
Le Festival des Gestes de la Recherche est organisé par l’ESAD Grenoble-Valence en partenariat avec Le Magasin – CNAC dans le cadre de la programmation de sa réouverture intitulée « La Position de l’Amour » et avec le soutien du Ministère de la Culture.
17h30 – 22h: CINDY BANNANI, Série Les vendeuses d’orange (2020) 13’39” et 12’48” [Vidéos – Salle de pratique]
17h30 – 22h: HUNITI GOLDOX, Rising up from Halite (2022) 30’ [Installation immersive – Petit bocal – Jauge: 8 personnes]
18h: BINTA DIAW, Paysages [Visite guidée de l’exposition – Galerie expérimentale] 30’
18h30: HUNITI GOLDOX, Rising up from Halite [Présentation de l’installation – Petit bocal] 30′
19h: CINDY BANNANI, Lancement de la résidence de recherche Nous étions 100 000 [Conférence – Salle de pratique] 30’
19h30: BELINDA KAZEEM-KAMINSKI, The Letter (2019) 17’ et Fleshbacks (2021) 7’ [Vidéos – Auditorium]
20h30: HABIBITCH, Decolonizing the Dancefloor (2022) 60’ [Performance – Auditorium]
21h30: ELSA M’BALA, Récits d’enfance, 30′ [Performance sonore – Auditorium]
17h30 – 22h: HUNITI GOLDOX, Rising up from Halite (2022) 30’ [Installation immersive – Petit bocal – Jauge: 8 personnes]
18h – 18h30: SELMA SELMAN, Salt Water (2016) 5’ en boucle [Vidéo – Auditorium]
18h30-19h: TABITA REZAIRE + AMAKABA, Cacao d’Amazonie (2021) 21’12” et Singing Bee Garden (2021) 10’23” [Vidéos – Auditorium]
19h15-20h15: EURIDICE ZAITUNA KALA, Sea (E)scapes (2015 – en cours) 60’ [Performance – Salle de pratique]
20h45-21h15: AMAR RUIZ, Playlist à partir de Rester barbare de Louisa Yousfi (2022) 30’ [Listening Session – Auditorium]
21h15-22h15: LOUISA YOUSFI, Rester barbare, 60’ [Conférence – Auditorium]
17h30 – 22h: HUNITI GOLDOX, Rising up from Halite (2022) 30’ [Installation immersive – Petit bocal – Jauge: 8 personnes]
18h: ALIOU DIALLO, MARIE MOREAU, SAÂ RAPHAËL MOUNDEKENO, CO-AUTRICES, CO-AUTEURS, BUREAU DES DÉPOSITIONS, Oeuvrer les limites du droit, 60’ [Conférence – Auditorium]
19h30: ELSA BRÈS, Aux coups de fusil qu’on entend (2022), 45’ [Présentation de l’artiste et projection vidéo – Auditorium]
20h30: DENISE FERREIRA DA SILVA + ARJUNA NEUMAN, 4 Waters: Deep Implicancy, (2019) 35’ [Vidéo – Auditorium]
21h30: NIKO G X KALI, TechnoWitches 45’ [Performance sonore – Auditorium]